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Jean-Christophe Tortora : « Il y a déjà un fort engouement du marché publicitaire pour La Tribune Dimanche »

Jean-Christophe Tortora : « Il y a déjà un fort engouement du marché publicitaire pour La Tribune Dimanche »
Jean-Christophe Tortora a repris La Tribune en 2011 dont il cédé le contrôle à CMA CGM cet été.

C’est la sensation de la rentrée dans le monde de la presse. Un nouveau quotidien du dimanche va faire son apparition dans les kiosques. La Tribune Dimanche sera lancée le 8 octobre en version papier et numérique. Une révolution pour le média économique qui avait abandonné le papier en 2020 et qui souhaite faire de son édition dominicale un journal généraliste. Bruno Jeudy, ancien du JDD, dirigera la rédaction. Jean-Christophe Tortora, Président de La Tribune, dont il a cédé le contrôle à CMA CGM cet été, dévoile les secrets de ce futur journal dans une interview à The Media Leader.

The Media Leader : Vous annoncez le lancement d’une édition dominicale de La Tribune le 8 octobre. Pourquoi maintenant ?

Jean-Christophe Tortora : Cela fait déjà quelques mois que je travaille à l’enrichissement l’offre éditoriale du week-end de La Tribune. Nous avons pris un certain nombre d’initiatives avec notre directeur de la rédaction, Philippe Mabille, notamment sur de nouveaux rendez-vous sur le digital le samedi matin. La Tribune cible tous les acteurs de l’économie avec une offre éditoriale forte en semaine, mais nous avons besoin d’accompagner nos lecteurs également le week-end, et d’aller au-delà de l’économie. Nous avons donc fait ce choix, en effet, de pouvoir sortir un journal papier dès le 8 octobre partout en France. La Tribune Dimanche sera un quotidien dominicale avec une offre plus généraliste que celle de la semaine.

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TML : Vous aviez abandonné le papier en 2020. N’est-ce pas audacieux d’y revenir sachant que la distribution des journaux est complexe, notamment le dimanche ?

J-C. T. : En effet, nous avions un hebdomadaire qui paraissait le vendredi. Il permettait d’enrichir notre offre pour les abonnés. Au lendemain de la crise du Covid, j’ai bien vu qu’avec l’accélération des usages numériques et le développement du télétravail, le papier n’avait plus tellement sa place en semaine. Nous avons pris cette décision de stopper la diffusion car nous étions impactés, comme beaucoup d’éditeurs, par la crise sanitaire. Nous avons décidé de mettre toute notre énergie sur notre offre digitale. Cela a été plutôt une réussite puisque l’entreprise a renoué très rapidement avec la croissance et la rentabilité. Quand on a arrêté l’hebdomadaire, je pensais vraiment que la seule légitimité du papier était pour le week-end. Le dimanche est le jour où les Français ont le plus de temps, notamment pour des lectures d’anticipation, de compréhension mais aussi de plaisir. Et comme vous l’avez rappelé, le dimanche, en même temps, c’est le jour où le réseau de distribution est le plus en repli avec moins d’offres de quotidiens nationaux. C’est donc un vrai pari. Avec La Tribune Dimanche, nous voulons créer un rendez-vous où les Français choisiront s’ils veulent le lire en papier ou en digital. Nous pensons qu’il y a encore un lectorat pour le format papier, que nous allons proposer en format berlinois de 32 pages. Pour les autres, il sera possible de le lire sur les supports digitaux.

Notre principal défi, c’est celui de redonner l’envie aux Français de revenir acheter de la presse chez leurs marchands de journaux le dimanche.

TML : Pensez-vous que la nouvelle ligne éditoriale du JDD qui sort d’un conflit avec sa rédaction après l’arrivée de Geoffroy Lejeune, vous permettra de faire venir des lecteurs ?

J-C. T. : La Tribune est, depuis 40 ans, un journal qui entreprend. Nous ne développons pas des projets en fonction de la concurrence. Ce serait une vraie erreur stratégique. Bien entendu, quand on veut installer un quotidien le dimanche, on regarde quel est l’environnement concurrentiel. Ce jour-là est plutôt dominé par une forte présence de la presse quotidienne régionale au côté d’une offre de presse nationale.
Avec la nomination d’un nouveau directeur de la rédaction, le JDD affiche une ligne politique assez claire. C’est leur choix, c’est leur droit. Nous allons faire quelque chose de très différent, sans ligne politique. Il y aura demain des lecteurs de La Tribune Dimanche qui seront, je l’espère, très nombreux, mais il y en aura également pour le JDD. En réalité, notre principal défi, c’est celui de redonner l’envie aux Français de revenir acheter de la presse chez leurs marchands de journaux le dimanche. Nous allons lancer une tournée partout en France à partir du 3 septembre pour aller écouter les Français sur leur vision d’un quotidien du dimanche, parce qu’on a beaucoup à apprendre de leurs propos et de leurs propositions. C’est important pour la vie démocratique de notre pays.

TML : Vous voulez ancrer La Tribune Dimanche dans les territoires. Vos concurrents seront donc aussi les éditions dominicales la PQR comme Ouest France, Sud Ouest ou Le Dauphiné Libéré ?

J-C. T. : En réalité, je ne pense pas que nous serons un concurrent direct avec la presse quotidienne régionale, mais plutôt complémentaire. Chez les marchands de journaux, j’observe que les lecteurs achètent la presse quotidienne régionale et un quotidien national. Et c’est là que La Tribune Dimanche aura toute sa place.

Nous allons recruter une quinzaine de journalistes.

TML : Vous avez recruté Bruno Jeudy, ancien du JDD, pour diriger La Tribune Dimanche. Combien de journalistes recrutez-vous ? D’anciens du JDD vont-ils vous rejoindre ?

J-C. T. : D’abord, La Tribune Dimanche va s’appuyer sur les 40 journalistes de la rédaction de La Tribune, dont la moitié d’entre eux est en régions. C’est très important, car nous souhaitons faire une presse nationale ancrée dans les territoires. Ce sera notre contrat de lecture. Nous allons élargir cette rédaction pour nourrir cette édition dominicale qui anticipera la semaine à venir. La politique aura une place forte, mais également de grands sujets d’enquêtes, autour de l’éducation ou de la planète. L’autre moitié sera dédiée à la lecture plaisir, à la culture et au lifestyle. On ne peut pas être dans un journal anxiogène qui nous enfermerait uniquement sur des sujets d’actualité. Pour cela, nous allons recruter une quinzaine de journalistes, notamment Soizic Quéméner qui sera numéro 2 de La Tribune Dimanche ou encore Ludovic Vigogne, un journaliste très connu et expert des sujets politique.

Nous avons déjà des engagements d’annonceurs pour les premiers numéros.

TML : Quel est le coût de ce lancement ? Quels sont les objectifs en matière de diffusion et de chiffre d’affaires publicitaires ?

J-C. T. : Dès le dimanche 8 octobre, le tirage sera de 120 000 exemplaires avec un prix de vente entre 2 et 3 euros. Nous souhaitons cibler le plus grand nombre de Français. Nous serons présents dans les grandes villes, mais également dans les territoires. Nous ne communiquons pas de chiffres, mais c’est un investissement important et surtout un pari industriel et éditorial, avec un retour sur investissement attendu sur plusieurs années.
Je peux vous dire que depuis l’annonce du lancement de La Tribune Dimanche, nous avons déjà un engouement très fort du marché publicitaire, notamment des agences médias, avec des engagements d’annonceurs pour les premiers numéros. La presse attire, notamment quand elle innove. C’est une très bonne nouvelle.

TML : Auriez-vous réalisé ce lancement sans le rachat de La Tribune par CMA CGM ?

J-C. T. : Nous n’aurions pas pu le faire sans le soutien de CMA CGM. Et c’est pour cette raison aussi que j’ai provoqué ce mouvement capitalistique. La Tribune Dimanche est le premier projet marquant de cette rentrée, et il y en aura d’autres dans les prochains mois.

TML : CMA CGM Médias est propriétaire de La Provence et possède d’autres participations, notamment dans Brut. Allez-vous créer des passerelles ?

J-C. T. : Il y aura certainement des synergies créatrices de valeurs avec La Provence. On peut aussi imaginer des partenariats avec Brut, même si CMA CGM Médias n’est qu’actionnaire minoritaire. Il ne faut pas s’en priver du moment que cela permet de renforcer chacune des marques. Ce qui prévaut est que les entreprises conservent leurs choix stratégiques et que les rédactions restent autonomes.

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